vers 1775
Sanguine sur papier
37 x 29,5 cm
Non daté, signé dans le bas à droite sur la monture : Robert
D.66
Don J.-V. Veyrenc, 1835
© Musée de Valence
Information
On peut, comme Jean de Cayeux en 1985, être frappé par l’impression tout à la fois de profonde similitude et de profonde différence qui se dégage entre l’esprit, le sujet et la composition de cette sanguine et les Lavandières à Frascati. Si, dans l’une, « l’architecture » qui structure et occupe la feuille est de pierre, dans l’autre, elle est toute de végétation, devenue par son caractère touffu aussi impénétrable et dense que la pierre.
En outre, les espaces clos, les perspectives semblent se répondre, dans l’une centrée sur la porte ouverte dans le mur de pierre, dans l’autre sur la percée dans la masse des frondaisons, toutes deux laissant le passage à de jeunes lavandières.
Hubert Robert réunit ici trois de ses motifs de prédilection, l’eau, la pierre, la végétation, et joue sur leur opposition : immobilité et solidité de la roche, fluidité de l’eau, densité mouvante des feuillages.
Il construit son dessin dans une perspective frontale et ascendante mêlant à la fois les obliques et une succession de plans et de masses qui se superposent en lecture verticale et convergent en même temps vers la petite silhouette de la jeune lavandière, apparition sur l’ombre des marches au centre de la composition. Ainsi, par leur unité colorée, par les jeux de la lumière qui s’y dépose, par leurs formes qui se confondent, les éléments s’y métamorphosent : l’eau devient rocher, le rocher devient frondaison, donnant ainsi une dimension monumentale à la nature. Monumentalité encore accentuée par le point de vue en contrebas choisi par l’artiste. Paysage auquel, de manière étonnante, les figures pittoresques de lavandières n’ôtent en rien la part de mystère et de grandeur. La figure de la lavandière portant son panier de linge sur la tête est déjà présente, mais cette fois vue de face, dans la peinture du musée de l’Ermitage Écuries dans les ruines de la villa Giulia, réalisée par l’artiste près de dix ans plus tôt, pendant son séjour à Rome, et dans La Charrette abritée du musée de Valence. On la retrouve encore, vue de profil, à Valence, dans Sous l’arc de Drusus.
Le musée des Beaux-Arts de Besançon conserve, toujours dans le fonds Pierre-Adrien Pâris, une contre-épreuve retravaillée de ce dessin intitulée Laveuses à la rivière.
Hubert Robert, Lavandières à Tivoli, vers 1775, Sanguine sur papier © Musée de Valence, photographie Cédric Prat, Studio L'Œil Ecoute